Les intents désignent un nouveau modèle de transaction qui permet aux utilisateurs des applications décentralisées d’indiquer uniquement le résultat attendu d’une opération et de confier les paramètres d’exécution à un tiers appelé « solver ». Ainsi, les intents peuvent résoudre le problème d’accessibilité du Web3 en permettant à l’utilisateur de penser uniquement au résultat et non au « comment ». Découvrez plus en détail ce que sont les intents, comment ils fonctionnent et leur rôle dans la démocratisation de la DeFi.
Qu’apportent les intents à la DeFi ?
Les intents désignent un type de transaction qui permet à l’utilisateur d’une application décentralisée (dApps) de renseigner uniquement l’objectif attendu, soit son « intention ».
Cette approche dite « intent-centric », c’est-à-dire centrée sur l’intention de l’utilisateur, permet à celui-ci de ne renseigner que le résultat souhaité, tandis que le paramétrage et l’exécution de cette transaction sont confiés à un agent tiers : le « solver ». La plupart des solvers sont des market makers professionnels ou des équipes internes au protocole lui-même.
En effet, l’objectif des intents est de réduire les frictions du côté des utilisateurs lors de leurs interactions avec le Web3.
De manière classique aujourd’hui, un utilisateur qui souhaite échanger 2 cryptomonnaies sur une plateforme d’échange décentralisée (DEX) doit réaliser plusieurs transactions, notamment :
- Approuver le token source sur son wallet ;
- Approuver le swap vers le token de destination ;
- Ajuster le seuil de slippage accepté ;
- et autres paramètres selon les protocoles.
Grâce aux intents, les utilisateurs interagissent avec le protocole et leur wallet comme à l’accoutumée, tout en bénéficiant d’une expérience utilisateur plus intuitive. Voici plus en détails comment fonctionnent les intents.
Grâce aux intents, l’utilisateur d’un protocole DeFi n’a qu’une action à réaliser : émettre une « intention ». Par exemple : échanger 150 USDC contre des BTC. Pour ce faire, l’utilisateur signe uniquement la transaction sur son wallet, puis celle-ci est envoyée aux solvers du protocole.
Les solvers entrent alors en compétition pour trouver la configuration d’exécution la plus avantageuse (frais de transaction, délai d’exécution, routage, etc.) parmi différentes applications, on-chain et off-chain. Le solver qui trouve la meilleure configuration de transaction l’exécute.
Voici un récapitulatif du déroulement d’une transaction sur un protocole qui utilise les intents :
- Depuis l’interface du protocole, l’utilisateur renseigne le résultat souhaité puis signe la transaction depuis son wallet ;
- Cette transaction est envoyée dans un pool du protocole, auquel le réseau de solvers a accès ;
- Les solvers du protocole entrent en compétition pour trouver la meilleure exécution pour cette transaction ;
- Le solver qui propose la configuration la plus avantageuse l’exécute ;
- L’utilisateur reçoit le montant de la transaction sur son wallet.
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La force des intents vient également du fait que les solvers utilisent de multiples sources de liquidité on-chain et off-chain, tandis qu’un utilisateur seul devrait comparer plusieurs protocoles.
Les intents rappellent les agrégateurs de DEX comme ParaSwap et 1inch qui permettent aux utilisateurs de sélectionner la transaction la plus intéressante parmi plusieurs DEX.
Toutefois, le but des intents est d’aller encore plus loin en délestant l’utilisateur de toute prise de décision.
Les avantages des intents
Les intents sont une avancée majeure au sein de la DeFi, car ils permettent à la fois d’éliminer les frictions propres à la sélection des paramètres d’exécution des transactions, et de protéger les utilisateurs de failles de sécurité comme les attaques de Maximum Extractable Value (MEV), les attaques sandwich ou de front-running.
Voici un récapitulatif des principaux avantages des intents en finance décentralisée :
- L’abstraction de gas : l’utilisateur n’a plus besoin de régler les frais de transactions, ces derniers sont directement prélevés par le solver dans la cryptomonnaie utilisée pour la transaction (par exemple de l’USDC), et non en token natif de la blockchain ;
- Réduction des frais de gas : les solvers peuvent exécuter des groupes de plusieurs transactions, réduisant les frais de gas que doivent payer les utilisateurs. La possibilité d’exécuter des transactions off-chain réduit également les coûts ;
- Une importante liquidité : les solvers croisent les sources de liquidités on-chain et off-chain, ce qui leur permet de répondre aux attentes des utilisateurs sans limites ;
- Moins de risques d’attaques MEV, car les solvers soumettent tous les ordres d’un lot à un prix uniforme, ne laissant aucun avantage à réordonner les transactions ;
- La possibilité de réaliser des échanges de tokens entre différentes blockchains sans avoir recours aux bridges à la fois complexes, chronophages et risqués ;
- La possibilité de réaliser plusieurs transactions à la fois.
Bien sûr, aussi révolutionnaires soient-ils pour les utilisateurs du Web3, les intents ont également leur lot d’inconvénients.
Les limites des intents
La praticité des intents ne se fait pas sans compromis, le principal inconvénient des intents étant qu’ils nécessitent d’avoir recours à un tiers.
En effet, les solvers agissent comme des tiers de confiance, ce qui entre en contradiction avec la volonté première de la blockchain de proposer un réseau désintermédié. S’en remettre à des solvers soulève plusieurs problématiques liées à la centralisation, notamment :
- Le risque de point unique de défaillance ;
- Le risque de censure au cas où un solver prend la liberté de favoriser des transactions et d’en exclure d’autres ;
- Le risque de hausse des frais de transaction dans le cas où un solveur serait malhonnête ;
- Le risque technologique, car les intents ajoutent une couche de complexité et impliquent d’interagir avec différents protocoles sur plusieurs blockchains.
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Quelles voies d’amélioration pour les intents ?
Plus de solvers pour une meilleure décentralisation
Plusieurs solutions sont envisagées pour résoudre le problème de la centralisation propre aux intents.
Tout d’abord, un plus grand nombre de solvers permettrait de réduire les risques de centralisation grâce à une dynamique de compétition. Toutefois, certains protocoles utilisent un système permissionné qui pose question au sein de l’écosystème blockchain qui se veut normalement permisionless.
Par exemple, l’agrégateur de DEX 1inch classe les solvers appelés « resolver » selon leur « unicorn power », déterminé par la quantité de tokens 1INCH en staking et la période durant laquelle ils ont été immobilisés. Le but est de limiter le risque d’avoir des solvers malhonnêtes, mais cela limite également le nombre de solvers éligibles. De la même façon, UniswapX applique un système de whitelist pour les solvers.
Un standard qui facilite l’intégration du côté des solvers
La création d’un standard pour les intents permettrait de réduire la complexité technique attendue des solvers, et ainsi d’augmenter le nombre de participants.
Uniswap Labs et Across ont proposé un standard ERC-7683 pour les intents sur la blockchain Ethereum et les blockchains EVM-compatibles, ce qui faciliterait l’intégration de cette technologie pour les solvers. La question reste toutefois irrésolue pour les autres blockchains.
5 protocoles DeFi qui utilisent les intents
De plus en plus d’applications de la finance décentralisée utilisent la technologie des intents pour proposer une meilleure expérience à leurs utilisateurs et par la même occasion en attirer de nouveaux.
Voici 5 exemples de protocoles DeFi qui utilisent les intents.
CoW Swap
Sur l’exchange décentralisé CoW Swap, les utilisateurs signent un message appelé « intention de trader » dans lequel ils indiquent les cryptomonnaies concernées par la transaction et le montant qu’ils souhaitent échanger.
Les intentions de plusieurs utilisateurs sont ensuite regroupées sous forme de lots envoyés aux solvers en compétition pour proposer la solution la plus intéressante. Le solver avec la meilleure proposition exécute les transactions et est rémunéré en tokens COW.
Uniswap
Le leader des DEX Uniswap permet de réaliser des transactions basées sur les intents via le protocole UniswapX.
UniswapX s’inspire du fonctionnement des adjudications à la hollandaise (Ducth auction) en permettant aux utilisateurs d’indiquer 2 paramètres : le minimum et le maximum de cryptomonnaies souhaités, ainsi qu’un intervalle de temps particulier pour réaliser la transaction. L’ordre est ensuite partagé aux solvers appelés « fillers », chargés de trouver la meilleure liquidité dans les pools de liquidité d’Uniswap v3 ou v2 en priorité, mais également on-chain et off-chain.
ParaSwap et 1inch
Les 2 agrégateurs de DEX ParaSwap et 1inch utilisent également les intents. ParaSwap propose depuis août 2024 son produit Delta et sa suite d’améliorations Portikus consacrée aux intents. De même, 1inch Fusion rassemble ses 2 solutions 1inch Aggregation et Limit Order pour exécuter des transactions sur la blockchain sans frais de gas grâce au 1inch Swap Engine qui relie les utilisateurs à une liquidité importante.
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Squid
Le routeur de liquidité Squid, construit sur Axelar, utilise le mécanisme des intents pour réaliser des swaps inter-blockchains instantanés, grâce au mécanisme Boost. Ainsi, Squid permet de réaliser des « 1-click swap » entre des dizaines de blockchains et avec plus de 50 cryptomonnaies, sans que l’utilisateur ait à décider des conditions d’exécution.
« Lorsqu’un utilisateur soumet une transaction sur une blockchain, notre infrastructure qui veille en permanence réalise le bridge nécessaire immédiatement, puis exécute le swap sur un DEX. L’utilisateur reçoit ses tokens instantanément », explique Fig, l’un des développeurs de Squid.
Notre avis sur les intents
Les intents dans la finance décentralisée répondent en partie au besoin de rendre le Web3 accessible à tous en réduisant sa complexité d’utilisation. Aussi, les intents apportent des solutions aux problèmes d’insuffisance et de fractionnement de liquidité entre les protocoles et les blockchains, un aspect majeur pour que le marché de la DeFi soit efficient et puisse se développer davantage.
Les intents pourraient être la révolution qui facilite l’adoption de masse, en réservant l’aspect technique à des acteurs dédiés et en permettant ainsi aux utilisateurs de ne se concentrer que sur les bénéfices. Par ailleurs, les intents, couplés à des solutions comme l’account abstraction (ou abstraction de compte) pourraient révéler le plein potentiel de ces outils et se traduire par un nombre d’utilisateurs croissant.
Les intents ont encore des défis à relever, notamment celui de la décentralisation des solvers, ainsi que le développement de cas d’usage plus complexes que le simple échange de cryptomonnaies.
Pour que les intents se développent réellement et jouent un rôle important dans l’adoption du Web3, il faudra également que des standards soient proposés pour les blockchains, et aussi que les protocoles DeFi adoptent cette technologie. D’autres cas d’usage devront également voir le jour, notamment pour le staking, le lending / borrowing, et autres services propres à la blockchain.
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Agathe Gautier
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