La cryptographie quantique repose sur l’utilisation de qubits pour garantir des échanges hautement sécurisés. Aujourd’hui, les protocoles de chiffrement reposent sur des techniques mathématiques toujours plus complexes et des clés de plus en plus longues, pour contrer la puissance galopante des ordinateurs capables de les casser. L’arrivée de l’ère quantique exige donc une transition vers des méthodes plus sûres. Découvrez les avantages de la cryptographie quantique, ses principes fondamentaux et ses applications concrètes.
Dans l’univers de l’infiniment petit, le comportement des particules diffère largement de celui des objets que nous observons au quotidien. En physique classique, de nombreux phénomènes sont prévisibles et sont plutôt intuitifs. Cependant, à l’échelle atomique, cette intuition doit être mise de côté au profit des équations mathématiques.
Tout ce qui nous entoure est composé de minuscules particules invisibles, même avec les meilleurs microscopes. Contrairement à la physique classique, qui considère qu’un objet occupe une position bien définie à un instant précis, la physique quantique établit que la position d’une particule n’est pas fixe, mais définie par un “nuage de probabilités”, rendant leur localisation incertaine jusqu’à ce qu’on les observe. De plus, ces particules peuvent interagir entre elles instantanément, quelle que soit la distance qui les sépare, phénomène connu sous le nom d’intrication quantique. Ces comportements singuliers constituent le domaine d’étude de la physique quantique, également appelée mécanique quantique.
En physique quantique, les particules se comportent tantôt comme des particules, tantôt comme des ondes. L’expérience célèbre des “double slit” illustre parfaitement ce phénomène. Une source envoie des particules (électrons ou photons) vers un écran comportant deux fentes rapprochées. Lorsque les particules sont observées individuellement, elles semblent passer par une seule des deux fentes, comme de petites billes. Mais si aucune observation n’est réalisée, elles forment un motif d’interférence sur l’écran, typique des ondes, indiquant qu’elles sont passées par les deux fentes à la fois.
https://www.researchgate.net/figure/Double-slit-experiment-with-a-photons-b-very-large-particles-c-electrons-Photons_fig1_349125115
Cette expérience démontre qu’en observant une particule, son état quantique est perturbé et cela l’oblige à se comporter soit comme une onde, soit comme une particule, mais jamais comme les deux simultanément.
Une autre expérience célèbre pour illustrer ces concepts est celle du “chat de Schrödinger“. Sont placés dans une boîte un chat vivant, un atome radioactif et une fiole de poison. L’atome a une chance sur deux de se désintégrer, ce qui déclencherait l’ouverture de la fiole et la mort du chat. Tant que la boîte reste fermée, le chat est dans une superposition d’états : il a une probabilité égale d’être vivant ou mort. Ce n’est qu’en ouvrant la boîte que l’on observe son état réel, cassant ainsi la superposition.
La première révolution quantique, au XIXe siècle, a bouleversé notre mode de vie en créant des composants essentiels de l’informatique moderne comme les lasers, transistors et circuits intégrés. La deuxième révolution, basée sur la notion d’intrication et amorcée au XXIe siècle, vise à contrôler la matière à l’échelle nanoscopique, ouvrant la voie à des innovations allant des capteurs quantiques aux communications et aux ordinateurs quantiques, là ou la cryptographie quantique peut tirer son épingle du jeu.
La maîtrise des phénomènes quantiques ouvre la voie à la course à l’ordinateur quantique. Contrairement aux ordinateurs classiques qui fonctionnent avec des bits, ces machines exploitent les qubits, capables de représenter simultanément 0 et 1 grâce au principe de superposition. Cette capacité leur permet de résoudre des problèmes mathématiques complexes de manière statistique et de surpasser tous les supercalculateurs actuels et futurs.
Cependant, cette avancée technologique représente une menace non négligeable pour les systèmes de chiffrement actuels. Les protocoles à clé publique, comme RSA, qui garantissentgarantissaient la sécurisation des connexions et la certification des données via la factorisation de grands nombres, sont particulièrement vulnérables et récemment officiellement interdit par le National Institute of Standards and Technology (NIST) des États-Unis d’ici 2035.
De même, les protocoles de chiffrement à clé symétrique, comme AES ou ChaCha20, verraient leur robustesse diminuer. Un ordinateur quantique pourrait significativement réduire le temps nécessaire pour les déchiffrer.
👉Tout savoir sur la cryptographie symétrique et asymétrique
Face à ces risques, des efforts mondiaux sont déjà en cours pour développer des contre-mesures. Le NIST travaille justement à la standardisation d’algorithmes de chiffrement dits “post-quantiques“, conçus pour résister aux capacités des ordinateurs quantiques.
En parallèle, la cryptographie basée sur les lois fondamentales de la physique quantique émerge comme une solution prometteuse pour garantir la sécurité à long terme dans un monde où l’informatique quantique devient une réalité. Cette dernière utilise des qubits pour transmettre des données sur de longues distances, généralement en s’appuyant sur des photons. Ce système garantit une sécurité totale : il est impossible de consulter ou d’altérer les données chiffrées en état quantique sans que l’expéditeur ou le destinataire s’en aperçoive.
Il est impossible de cloner une information quantique sans la détruire ou de mesurer un état quantique sans le modifier. Grâce à leur capacité à transporter l’information quantique, les photons sont le support privilégié. Ils peuvent encoder les données sur des variables observables, comme la polarisation (verticale pour représenter 1, horizontale pour représenter 0), et transmettre ces informations via des câbles de fibre optique.
Un exemple typique de cryptographie quantique est la distribution de clés quantiques (QKD), qui permet un échange sécurisé de clés entre deux parties. Cette méthode génère une clé privée partagée utilisée ensuite pour des techniques de chiffrement classiques à clé symétrique. Des protocoles célèbres comme BB84, B92 ou E91 illustrent ces applications.
Pour établir une clé quantique, Alice (l’expéditeur) envoie des photons à Bob (le destinataire) via un polariseur, qui modifie leur polarisation (verticale, horizontale ou diagonale). Les photons voyagent dans une fibre optique jusqu’à Bob, représentant une séquence de bits en fonction de leur polarisation. Bob utilise des séparateurs de faisceaux aléatoires pour tenter de lire la polarisation des photons. Alice communique à Bob le type de polariseur utilisé pour chaque photon. Bob compare ces informations et détermine quels bits sont corrects, formant ainsi une clé commune.
Une interception par une tierce personne (Eve) perturberait inévitablement les photons. Mesurer un photon modifie son état quantique, rendant la tentative d’espionnage détectable. Toute modification non autorisée introduit des erreurs dans les données reçues par Bob, alertant les participants. Eve ne peut ni cloner les photons, ni éviter de révéler sa présence, car l’état quantique original est altéré dès qu’elle interagit avec le système.
La cryptographie quantique, et en particulier la QKD, offre un niveau de sécurité très fort grâce à la fragilité des états quantiques. Toute tentative d’interception modifie les informations et expose l’espionnage. Avec ces avancées, la cryptographie quantique ouvre la voie à des échanges d’informations inviolables, révolutionnant la manière dont nous protégeons les données sensibles.
Cette technologie n’est plus seulement au stade de la recherche fondamentale mais entre maintenant dans celui de la commercialisation. Ses implémentations restent limitées sur les infrastructures actuelles, avec des vitesses de quelques milliers de bits par seconde sur des distances avoisinant 100 km. Cependant, sur des infrastructures spécialisées, des chercheurs chinois ont réussi à atteindre des débits d’échange de clés de 110 mégabits par seconde sur une distance de 328 km. Mais dans ce type de domaine, cela reste difficile d’effectuer une évaluation précise des progrès réalisés avec toutes les expériences classées secrètes.
Quelles sont les applications de la cryptographie quantique ?
Des communications sécurisées
La QKD permet d’établir des connexions réseau sécurisées en utilisant des photons et leurs états pour transmettre une clé. Grâce à la sensibilité des états des photons, qui changent à chaque mesure, il est possible de détecter de manière fiable toute tentative d’interception. Des initiatives telles que ParisRegionQCI, reliant plusieurs nœuds quantiques via des partenaires comme Orange à Châtillon, le laboratoire LIP6 de Sorbonne Université à Jussieu, ou encore Thales et Télécom Paris sur le plateau de Saclay, ont récemment démontré la faisabilité du déploiement de la QKD sur les réseaux fibrés existants. Ces avancées devraient grandement faciliter leur adoption à grande échelle dans un avenir proche.
C’est pour cela que la cryptographie quantique pourrait ajouter une couche de sécurité essentielle dans divers secteurs :
- Services financiers
En adoptant des méthodes de chiffrement résistantes aux attaques quantiques, comme la distribution quantique de clés (QKD), les institutions financières peuvent :
- Protéger leurs données sensibles.
- Sécuriser les transactions.
- Anticiper les menaces émergentes, notamment celles posées par les ordinateurs quantiques.
- Cloud Computing
Les centres de données et les environnements de cloud computing, qui gèrent d’énormes volumes d’informations sensibles, peuvent bénéficier de :
- Algorithmes de chiffrement résistants aux attaques quantiques.
- Protocoles QKD pour établir des canaux de communication sécurisés.
- Ces technologies assurent la confidentialité et l’intégrité des données transmises et stockées.
- Défense et sécurité nationale
Les gouvernements et les organisations de défense peuvent renforcer leurs communications en utilisant la cryptographie quantique pour :
- Transmettre de manière sécurisée des informations classifiées.
- Protéger les communications militaires contre toute tentative de compromission.
- Santé et données médicales
Le secteur de la santé, qui traite des informations sensibles comme les dossiers médicaux des patients, peut intégrer la cryptographie quantique pour :
- Garantir la confidentialité et l’intégrité des dossiers électroniques de santé.
- Prévenir les accès non autorisés ou les altérations de données médicales.
Un rôle clé pour la sécurité des blockchains
L’arrivée de l’informatique quantique pose un défi majeur pour Bitcoin et les autres blockchains. Ces systèmes reposent actuellement sur des mécanismes de cryptographie asymétrique qui deviendront vulnérables face à la puissance de calcul des ordinateurs quantiques. Un attaquant doté de capacités quantiques pourrait, en théorie, récupérer les clés privées à partir des clés publiques, compromettant ainsi la sécurité des portefeuilles et des transactions.
Pour se prémunir contre cette menace, les blockchains devront intégrer des mécanismes de cryptographie résistantes aux attaques quantiques. Cela pourrait alors impliquer une transition généralisée vers ces nouveaux algorithmes, ainsi que des protocoles sécurisés pour l’échange de clés.
Par exemple, des propositions d’amélioration (BIPs) de Bitcoin pourraient émerger dans les années à venir afin de garantir sa pérennité dans un monde post-quantique. Bien évidemment, une telle transition serait soigneusement planifiée et pourrait prendre plusieurs années avant d’être finalisée.
La génération de nombres véritablement aléatoires
Tous les protocoles de chiffrement, y compris ceux liés à l’informatique quantique, nécessitent une source de nombres aléatoires.
Cependant, les méthodes traditionnelles de génération ne produisent pas de véritables nombres aléatoires, d’où leur appellation de nombres pseudo-aléatoires.
En revanche, les résultats des mesures en physique quantique étant fondamentalement imprévisibles, ils peuvent être exploités pour générer des nombres parfaitement aléatoires.
👉 Que deviendra Bitcoin avec la domination de l’ordinateur quantique ?
Quelle est la différence entre cryptographie post quantique et cryptographie quantique ?
Le post-quantique désigne l’ensemble des protocoles cryptographiques jugés résistants aux ordinateurs quantiques à l’horizon 2035, selon des organismes de standardisation tels que le NIST.
Ces protocoles relèvent de la cryptographie classique, car ils reposent sur des bases mathématiques traditionnelles adaptées aux ordinateurs actuels. Ils ne doivent pas être confondus avec la cryptographie quantique, qui s’appuie sur les principes de la physique quantique, adoptant ainsi un paradigme assez différent.
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